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Lumière pâle sur les collines

Synopsis :

Royaume-Uni, 1982. Une jeune anglo-japonaise entreprend d’écrire un livre sur la vie de sa mère, Etsuko, marquée par les années d’après-guerre à Nagasaki et hantée par le suicide de sa fille aînée. Etsuko commence le récit de ses souvenirs trente ans plus tôt, lors de sa première grossesse, quand elle se lia d’amitié avec la plus solitaire de ses voisines, Sachiko, une jeune veuve qui élevait seule sa fille. Au fil des discussions, l’écrivaine remarque une certaine discordance dans les souvenirs de sa mère… les fantômes de son passé semblent toujours là – silencieux, mais tenaces.

D’après le roman de Kazuo Ishiguro – Lauréat du prix Nobel de littérature.

Critique :

« Lumière pâle sur les collines » de Kei Ishikawa, sortie le 15 octobre 2025. (METROPOLITAN FILMEXPORT A PALE VIEW OF HILLS FILM PARTNERS)

Ce très beau film de Kei Ishikawa invite à s’interroger sur l’histoire et sur les mécanismes de la mémoire, à l’échelle intime et collective.

Kei Ishikawa adapte avec une grande sensibilité le tout premier roman de Kazuo Ishiguro, écrivain britannique d’origine japonaise couronné par le prix Nobel littérature en 2017. Dans ce film plein de délicatesse, qui joue les motifs du cinéma classique japonais, ce représentant de la jeune génération du 7e art nippon revient sur un épisode tragique de l’histoire de son pays, marqué par les traumatismes physiques et psychologiques indélébiles laissés sur les populations touchées par les bombes atomiques larguées sur Hiroshima et Nagasaki en 1945. Présenté en sélection Un certain regard au Festival de Cannes 2025, Lumière pâle sur les collines sort dans les salles mercredi 15 octobre.

Nagasaki, 1952. Etsuko, jeune mariée, attend son premier enfant. Elle se lie d’amitié avec sa voisine, Sachiko, une jeune veuve victime de la bombe atomique larguée par les Américains sur Nagasaki, qui élève seule sa fille et rêve d’un avenir meilleur aux États-Unis.

1982. Grande-Bretagne. Trente ans plus tard, Niki, la fille cadette d’Etsuko rend visite à sa mère, qui a décidé de vendre la maison familiale, hantée par le souvenir de sa fille aînée, qui s’est suicidée. Niki souhaite écrire un livre sur l’histoire d’Etsuko, et commence à la questionner sur son passé au Japon. Que s’est-il vraiment passé dans ces années d’après-guerre, avant le départ d’Etsuko pour la Grande-Bretagne et avant sa naissance ? Au fil des échanges entre la mère et sa fille, un récit se dessine, qui brouille les pistes d’une histoire hantée par les non-dits et les fantômes du passé.

« Se cacher des vérités insupportables »

Avec cette adaptation, Kei Ishikawa, jeune figure de la nouvelle génération du cinéma japonais, offre un regard contemporain sur l’histoire de son pays. Le film, qui s’ouvre sur des photos d’archive, dépeint le Japon pendant les années d’après-guerre, de reconstruction, années de misère et d’occupation américaine. Kei Ishikawa revient sur cette période sombre de l’histoire du Japon, et sur les traumatismes, physiques et psychiques, à l’échelle des individus et des familles, de cette guerre. Il dit les non-dits, la stigmatisation des populations directement touchées, mais aussi l’humiliation d’un peuple nationaliste et guerrier, contraint à la reddition après les bombardements d’Hiroshima et Nagasaki.

Cette difficulté à digérer, mais aussi à accepter que le monde change, est incarnée par le personnage du beau-père d’Etsuko. Le vieux professeur sympathique est dans l’incapacité d’accepter la défaite et les changements profonds à l’œuvre dans son pays après la Seconde Guerre mondiale. Le film s’attarde aussi sur la place de la femme, reléguée à l’enfantement et aux tâches ménagères, dévouée à son époux. Cet héritage est raconté d’une manière extrêmement délicate, avec un scénario qui reprend l’essentiel de la trame du roman de Kazuo Ishiguro, à travers le portrait d’une femme japonaise qui a, malgré (ou grâce) aux traumatismes de la guerre, trouvé le chemin de son émancipation.

 

Dans une mise en scène très soignée, très juste, avec, notamment pour la période des années 1950 une photo qui évoque le cinéma de l’époque, très éclairé, presque théâtral, comme un conte quasi irréel nous suggérant en sous-texte la réinvention et la mise en scène d’une histoire impossible à digérer pour Etsuko. Le réalisateur met ainsi en scène à l’écran ce « narrateur non fiable », imaginé par Kazuo Ishiguro, adepte de ce procédé littéraire également mis en œuvre dans Les Vestiges du jour, un autre roman de l’écrivain britannique adapté à l’écran par James Ivory en 1994. Un bouquet de lys, un violon, une petite caisse en bois… Kei Ishikawa glisse dans les décors, dans les paysages, dans les photos, des indices qui nous font naviguer d’une période à l’autre, comme les témoins muets d’une histoire difficile à démêler.

« Souvent, on ne ment pas pour tromper les autres. On le fait pour se tromper soi-même, et se cacher des vérités insupportables », nous dit Kazuo Ishiguro. Ce très beau film, pudique et impressionniste, en plus de dresser le portrait d’une femme, de son histoire intime, et à travers elle celle du Japon, nous invite à réfléchir sur la mémoire et sur la vérité. Il nous questionne sur la manière dont les individus, et plus largement la société tout entière, intériorise et restitue son histoire et les traumatismes qu’elle charrie, pour mieux en supporter le poids.

Les bandes-annonces des films de la semaine :